ABC 2022

Z-La téléphonie cellulaire : la nouvelle bataille de La Grand’Terre et Trois-Cailloux

La Grand’Terre et Trois-Cailloux, sur la péninsule de Port-au-Port, sont des localités privées d’accès à la téléphonie cellulaire. Une mobilisation populaire est en cours pour en finir avec cette « zone morte » d’appels sans fil. 

Magazine d’été 2022 – Z-Zone morte

Jacinthe Tremblay 

L’accès à la téléphonie cellulaire a été identifié comme la priorité absolue pour assurer le développement économique de La Grand’Terre et de Trois-Cailloux lors d’une consultation publique tenue en janvier 2016 à l’initiative de Wendy Brake, agente de développement du  RDÉE TNL pour la côte ouest de Terre-Neuve. Cette rencontre avait réuni plus d’une quarantaine de participants.

La compagnie Bell Mobility, contacté par madame Brake après cette rencontre, avait estimé le coût d’installation d’une tour desservant la montagne entre Cap-Saint-Georges et La Grand’Terre, cette localité, Trois-Cailloux et Lourdes à plus de 1 million de dollars. Sans soutien gouvernemental, le projet était inabordable. 

Wendy Brake, agente de développement du RDÉE TNL pour la région ouest de Terre-Neuve lors de la consultation publique de janvier 2016 à La Grand’Terre. Crédit : RDÉE TNL

Le lancement, en avril dernier, d’un programme de soutien financier du ministère provincial du Tourisme, de la Culture, de l’Industrie et de l’innovation aux communautés non desservies par la téléphonie cellulaire a ravivé l’espoir. Wendy Brake s’est remise au travail. 

« Pour obtenir le financement gouvernemental à hauteur de 25 % des coûts du projet, nous devons démontrer que notre projet comporte des innovations et qu’il est crucial pour le développement économique. Les communautés desservies doivent de plus y contribuer financièrement », explique-t-elle. 

Contactée à nouveau par Wendy Brake, Bell Mobility a alors proposé une technologie différente ramenant l’investissement nécessaire à 461 062 $, auquel la compagnie s’est  engagée à assumer 60 % des coûts. Reste à combler par les gens de La Grand’Terre et de Trois Cailloux : 69 159 $!  C’est sur ces bases qu’une demande de financement a été déposée à la province en août dernier. 

Mobilisation

Mission impossible alors que la population directement visée par ce projet totalise  511 personnes, selon les données du recensement de 2016? « En menant une levée de fonds qui fait appel à tous ceux et celles qui ont intérêt à ce qu’un tel service soit mis en place, nous pouvons y arriver! », croit fermement Dwight Cornect, président du Comité Service Cellulaire La Grand’Terre & Trois Cailloux et RDÉE TNL. 

Ce comité a été formé à la suite d’une rencontre publique organisée par Wendy Brake le 7 août dernier à La Grand’Terre à laquelle plus d’une trentaine de personnes ont participé.  En plus de monsieur Cornect, ce comité est composé de Rose Gallant (vice-présidente), Nina Tourout Retieffe (secrétaire), Zita Hinks (trésorière) et de trois directrices : Martina Cornect, Ronalda Lainey et Gayle Marche. 

L’évolution de la campagne de levée de fonds semble donner raison à Dwight Cornect. Au 30 août, soit à peine un mois depuis le lancement de cette levée de fonds, plus de 10 000 $ avaient déjà été récoltés, dont plus de 6 000 $ lors d’une opération de porte-à-porte dans les deux villages.

Un support local inouï

Zita Hinks est une des quatre femmes qui ont cogné aux portes à la mi-août pour obtenir des appuis financiers de la population de La Grand’Terre et de Trois-Cailloux. « La réponse des gens a été incroyable. La téléphonie cellulaire est essentielle de nos jours. Pendant le porte-à-porte, les gens nous ont beaucoup parlé de leurs inquiétudes pour la sécurité des élèves », a-t-elle souligné en entrevue téléphonique.      

Les exemples sont nombreux des impacts négatifs de l’absence de ce service non seulement pour les gens qui vivent dans ces localités mais également pour les entreprises qui les desservent.  

Les pêcheurs, par exemple, doivent retourner à la maison pour signaler leur arrivée à quai et faire inspecter et calculer leurs prises. Les livreurs de matériaux doivent souvent se rendre à la station-service de La Grand’Terre pour aviser leurs clients que leur commande arrive. Les chercheurs d’emploi qui doivent confirmer leur candidature en ligne en entrant un code de cellulaire ne peuvent le faire sans aller au village voisin et utiliser l’appareil qui appartient à quelqu’un d’autre.  

« Les proches qui nous visitent et les touristes pestent aussi contre l’absence de signal cellulaire », note pour sa part Dwight Cornect. Voilà pourquoi la campagne de levée de fonds déborde largement de la « zone morte ».

Plusieurs marrons au feu

En plus de solliciter la population locale, le comité a cogné aux portes des entreprises et de plusieurs acteurs économiques de la grande région de la Baie Saint-Georges. À ce jour, il a obtenu un appui financier de 2 500 $ du Bureau de développement économique de la Ville de Stephenville et de 1 000 $ de Abbott et Haliburton, un commerce phare de la péninsule de Port-au-Port. D’autres contributions d’entreprises étaient attendues au moment de fermer nos pages, le 5 août. 

Plusieurs citoyens ont donné des produits pour un tirage. Des activités sociales (danse, soirée de talents) sont en préparation par des organismes communautaires, tout comme une nouvelle ronde de porte-à-porte. « Nous avons l’habitude des batailles à La Grand’Terre. C’est comme ça que nous avons eu tout ce que nous avons ici : une école française, la route sur la montagne et la chapelle. Cette bataille, nous allons la gagner », a résumé madame Hinks. 

« Nous voulons également obtenir des appuis d’individus de l’extérieur de la région, comme des anciens résidents qui reviennent ici en vacances et des touristes qui pestent contre l’absence de cellulaire », a souligné Dwight Cornect. À cette fin, le RDÉE TNL a mis en place une campagne de sociofinancement GoFundMe qui permet de contribuer au moyen d’une carte de crédit. De plus, un compte bancaire permettant les contributions par virement Interac sera sous peu créé par le RDÉE TNL. 

La réponse du gouvernement provincial à la demande de financement viendra plus tard cet automne. « Nous n’aurons peut-être pas réuni tout la somme exigée des communautés desservies mais ce que nous avons déjà récolté est un signal très clair de notre volonté d’avoir ce service », a conclu Dwight Cornect. 


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