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Une rafale d’opinions autour du projet éolien

L’énergie verte devenant de plus en plus populaire, il semble assez évident que la construction des éoliennes soit une solution simple pour lutter contre le réchauffement climatique. La construction d’un parc éolien pourrait commencer en 2023 sur la péninsule de Port-au-Port mais la transition verte n’est pas si évidente pour ses résidents.
Shelby-Lynn Kerfont | IJL – Réseau.Presse – Le Gaboteur

Avec un projet en cours visant la construction de 164 éoliennes sur la péninsule de Port-au-Port, la province tente rapidement de développer son secteur énergétique afin de trouver des solutions vertes, alternatives au pétrole. Le mégaprojet d’énergie éolienne proposé par la compagnie World Energy GH2 est encore à l’étude mais, s’il se concrétise, l’énergie éolienne serait envoyée dans une usine d’hydrogène à Stephenville pour être convertie en ammoniac et être ensuite vendue en Europe.

Ce projet provoque un grand désaccord au sein de la population de la côte ouest de l’île, et surtout sur la péninsule de Port-au-Port. Si plusieurs se réjouissent des possibilités d’emploi dans leur coin de la province, beaucoup d’autres s’inquiètent de l’environnement et de la façon dont les éoliennes affecteraient leur vie quotidienne.

Création de l’énergie verte et des emplois

L’un des arguments les plus forts avancés par les habitants de la région est que le projet créerait des emplois pour les locaux, qui connaissent depuis longtemps les effets d’un exode rural. Le manque de travail pousse beaucoup de jeunes à quitter la région pour trouver du travail ailleurs, comme en Alberta. Pour certains, la création d’emplois grâce à un tel projet est essentielle pour revitaliser la région.

«Je serais plus que disposé à suivre les cours nécessaires afin d’être qualifié pour travailler sur le projet d’éolienne. Avoir un emploi à la maison rendrait tout tellement plus facile plutôt que de faire des allers-retours en Alberta plusieurs fois par an pour le travail», confie un jeune habitant de Cap Saint-Georges qui souhaite rester anonyme pour éviter les réactions de ses voisins.

World Energy GH2 indique que le projet créerait 100 emplois permanents à Stephenville et 50 sur la péninsule. Cependant, ces emplois ne sont qu’hypothétiques, même si le projet va de l’avant. Le campus de la baie Saint-Georges du College of the North Atlantic propose déjà une formation de technicien d’éolienne, qui débutera en septembre prochain, mais l’offre de cours peut changer selon si le projet est ou non accepté. «Le College of the North Atlantic se réserve le droit d’annuler ou de modifier la date et le lieu de livraison de toute offre de programme et méthode de livraison, et le fera en temps opportun afin de minimiser l’impact sur les candidats», peut-on lire sur son site web.

Une carte de la péninsule de Port-au-Port de Terre-Neuve-et-Labrador. La mer est représentée en bleu pâle et la terre en vert pâle. Il y a plusieurs différentes couleurs de lignes et points sur la terre.
Si le mégaprojet se concrétise, toutes ces éoliennes occuperont 33 453 acres de terrain, soit environ 40% de la superficie de la péninsule. Photo: Project Nujio’qonik GH2 Environmental Assessment Registration

Si le mégaprojet se concrétise, toutes ces éoliennes occuperont 33 453 acres de terrain, soit environ 40% de la superficie de la péninsule. Photo: Project Nujio’qonik GH2 Environmental Assessment Registration

Le coût écologique de l’énergie éolienne

Si certains se réjouissent de pouvoir trouver un emploi dans un secteur d’énergie verte près de chez eux plutôt que dans le pétrole, au large des côtes ou en Alberta, d’autres s’inquiètent de l’impact environnemental de la région elle-même.

Avec un rivage rocheux mesurant environ 130 kilomètres sur la péninsule, ces éoliennes seraient mises en place sur une superficie relativement petite.

La hauteur d’une éolienne standard est de 280 pieds. Une éolienne de cette hauteur aurait un diamètre de rotor d’environ 400 pieds. Les éoliennes prévues pour la péninsule auraient par contre une hauteur presque trois fois plus grande à 654 pieds avec un diamètre de rotor d’environ 518 pieds. Chacun nécessitera 6,17 acres de terrain défriché. 

Toutes ces éoliennes occuperaient 33 453 acres de terre – environ 40% de la superficie de la péninsule. De plus, beaucoup de routes d’accès devraient être construites dans la forêt afin de mettre ces éoliennes en place.

Un projet aussi imposant aurait donc des conséquences importantes sur  la faune et la flore, sans parler des effets secondaires à long terme sur les habitants de la péninsule. «Nous perdrions beaucoup d’arbres et de plantes menacées. Avec tous les camions et la construction nécessaire, le bruit ferait certainement peur aux animaux comme des lapins, orignaux, renards, et beaucoup d’autres», s’inquiète un membre du district des services locaux à la Grand’Terre qui souhaite aussi rester anonyme pour des raisons de confidentialité. 

La péninsule abrite de nombreuses espèces en voie de disparition et en péril, notamment les plantes suivantes: l’astre de Lindley, le mélampyre de Mackenzie et l’arnica laineux. C’est également l’un des rares endroits où l’on peut trouver des landes calcaires, un paysage peu ordinaire qui ne couvre que 0,01% du territoire de la province et qui abrite une écologie tout aussi unique.

En juillet dernier, le gouvernement provincial a publié un plan visant à protéger dix espèces végétales en voie de disparition qui vivent dans les landes, mais avec un tel mégaprojet en vue, ces efforts resteront-ils vains?

Un des groupes qui s’oppose à  ce projet, la Environmental Transparency Committee, a signalé en novembre dernier que certains travaux liés à ce chantier ont déjà causé des dégâts dans la région. Plusieurs habitants de la région ont également partagé des photos de ces travaux sur les réseaux sociaux.

Une décision pour 2023

Le projet d’éoliennes sur la péninsule de Port-au-Port est toujours à l’étude. Il n’y a pas de réponse claire quant à savoir s’il sera réalisé ou non. Le projet fait encore l’objet d’une évaluation environnementale menée par le gouvernement provincial, mais s’il est approuvé, la construction des éoliennes commencerait à la fin de 2023. 

Avec un calendrier aussi serré, beaucoup ne savent toujours pas si le projet sera réellement bénéfique pour la région ou si leur vie sera changée pour le pire. Une chose est certaine: il est important de peser les deux côtés d’un projet de cette ampleur.

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