Arts et artisanat, Arts et culture, Tous

The Kirk en papier: Rencontre sous le soleil d’automne avec Joy Hecht

Après toute une aventure dans les rues de St. John’s pour la trouver, je me suis assise avec l’artiste Joy Hecht, en train de réaliser un collage face à l’église The Kirk dans le cadre du Défi Sketch organisé par le Festival des arts visuels en Atlantique (FAVA). Installée au soleil, la New-Yorkaise, à Terre-Neuve depuis douze ans, se raconte en français au Gaboteur à travers son art.

Rose Avoine-Dalton (Texte et photos)

La deuxième édition du Défi Sketch Atlantique invite quatre artistes de chaque province à aller dans des lieux publics pour créer des croquis dans leur proprestyle artistique. La seule artiste participante de Terre-Neuve-et-Labrador, Joy Hecht, a choisi de créer sa première esquisse représentant une scène se déroulant dans le port de St. John’s. Pour trouver un bon point de vue dans un lieu public, elle décide d’aller au plus haut niveau d’un stationnement proche de l’eau. Elle opte pour le stationnement attaché à Atlantic Place sur Harbour Drive, un immeuble de neuf étages directement au milieu du centre-ville de la capitale.

L’artiste m’a donné rendez-vous à 13h, mais à 13h15, j’étais un peu perdue dans le grand bâtiment. Comment accéder au toit dont elle m’avait parlé au téléphone? Avec l’aide de trois ascenseurs, une employée aidante et un garde de sécurité, j’ai finalement réussi à m’y rendre. Qu’y a-t-il là-haut? Une vue panoramique magnifique du port de St.John’s, mais… pas d’artiste.

Où est Joy?

Un coup de fil plus tard, j’apprends que je suis bien sur le bon toit, Mme Hecht était ici, mais bien évidemment, elle n’y est plus. Pourquoi? Rendu au stationnement, l’artiste s’est rendu compte que sa trousse d’outils était restée à la maison. Impossible de créer ses collages sans ciseau et colle, elle devait donc retourner les chercher chez elle.

Plutôt que de revenir ensuite vers Atlantic Place, Mme Hecht se souvient alors d’un endroit bien plus près de chez elle: l’Église presbytérienne de St. Andrew’s, mieux connue sous le nom The Kirk dans la capitale. Construite il y a presque 130 ans, l’église de briques rouges est bien visible dans le centre-ville avec sa grande tour pointue. «Je n’avais jamais regardé l’église de ce point de vue, je me suis dit, “mais ce n’est pas mal!”», m’explique-t-elle au téléphone avant de m’y donner rendez-vous.

Sans me perdre cette fois-ci, je retourne dans le bâtiment, puis me mets en route vers notre nouveau lieu de rencontre. Être dehors est bien agréable en cette journée de début d’automne étonnamment chaude.

En marchant vers l’église, je trouve l’artiste, assise sur le sol du stationnement, le dos incliné contre une voiture et les jambes étendues sur l’asphalte. Le soleil tape fort en cet après-midi, elle se tient donc derrière une automobile pour profiter du petit bout d’ombre qu’elle offre. Alternant son regard entre la bâtisse religieuse et son ébauche artistique, elle est concentrée à couper des bouts de papier rouge qui créeront les murs de l’église. Je vois bien que Joy a retrouvé ses outils, autour d’elle se trouvent des bâtons de colle de toutes les tailles, des crayons, des petits ciseaux, des grands ciseaux, des gommes.Son petit set-up n’a rien de formel, mais l’artiste a tout ce dont elle a besoin pour créer une œuvre d’art. Le strict nécessaire.

Joy Hetch assise sur le gravier d’un stationnement montre un outil à la caméra.
«Ça, c’est mon outil préféré, je l’appelle my spike. En fait, c’est pour manipuler les petits morceaux de papier sur la colle», explique Mme Hecht en montrant à notre caméra l’aiguille dans un bouchon.
La main de Joy Hetch pointe à une des pages de son cartable de papier, ici ouvert pour montrer une sélection de morceaux vert pâle.
Le cartable rempli de papiers aux différentes textures que Joy Hecht me montre n’est qu’une petite partie de sa collection. «J’en ai bien plus chez moi!», se réjouit-elle.

Passion collage

«Je faisais des aquarelles et quelques fois des dessins, mais j’avais toujours voulu faire des collages. Alors un jour je me suis dit “Bon et bien, je vais commencer à en faire!”» Ça, c’était il y a cinq ans, et depuis la New-Yorkaise produit des œuvres d’art impressionnantes. Paysages de campagne, grandes villes nocturnes illuminées, plantes, humains… Son art met en scène une grande diversité de thèmes. Pour créer ses représentations, l’artiste coupe des petits bouts de papier coloré individuellement et passe des heures à les coller de manière minutieuse pour construire les formes de son sujet.

Elle nous montre son cartable de papier: «En principe, ces papiers sont organisés par couleur». Morceaux recouverts de peinture, papier en tissu ayant servi à emballer des cadeaux, pamphlets reçus par la poste, lettres, presque tous ses matériaux multicolores auraient autrement été destinés au recyclage.

Un collage fait de papier, qui représente une église rouge et des arbres verts.
Après un après-midi de travail au soleil, le produit final des efforts de l’artiste représente un collage de l’église au style d’architecture gothique. Photo: Courtoisie Joy Hecht

De New York à St. John’s

Je demande à la femme originaire des États-Unis, d’où vient son français. «New York!» dit-elle en riant. «J’ai fait sept années de français, j’ai commencé à 11 ans à l’école. Après ça, j’ai vécu en France, mais en fait j’ai vraiment appris le français à l’école. J’avais de bons profs, je crois.»

Avant la pandémie, l’exploratrice partait souvent voir le monde par elle-même, en plus de voyager fréquemment pour son autre travail – quand elle n’est pas artiste, elle est aussi consultante en développement.

Vivre dans la province de Terre-Neuve est le fruit d’une de ses aventures. «Je ne suis pas venue directement de New York, j’habitais à l’époque au New Jersey. […] J’ai décidé que je voulais voyager un peu partout, donc j’ai acheté un vieux com-bi [un van de la marque Volkswagen] et j’ai vécu deux ans et demi dedans, pendant que je voyageais. […] Je suis arrivée comme ça à Terre-Neuve, c’était en 2006, je me suis dit “tiens, c’est génial ici! Je pourrais vivre ici!”» Depuis, elle s’est acheté une maison «juste un peu comme ça» et y habite depuis 12 ans.

L’Américaine m’explique alors que le temps est venu aujourd’hui pour elle de quitter le Canada: elle a récemment vendu sa maison et planifie lentement son retour à New York. Après lui avoir dit au revoir, je laisse l’artiste avec ses papiers, sa colle et une moitié d’église créée sur sa page blanche. Impatiente de voir le résultat final du projet, mais aussi espérant ne pas me perdre en retournant à la maison…

Vous pouvez trouver les croquis de l’artiste réalisés dans le cadre du Défi Sketch Atlantique et ses autres œuvres sur la page Facebook Joy Hecht Arts ou Instagram @joyhecht_arts

Une église de briques rouges, avec des arbres pleins de feuilles vertes en avant, avec un ciel bleu au fond.
L’église presbytérienne St. Andrew’s qui est le sujet du premier croquis de l’artiste, est mieux connue localement sous le nom de The Kirk, mot écossais qui signifie «église».

SUR LE BORD DU MONDE

Du 22 au 25 septembre, le Centre Culturel de Caraquet a présenté la 25e édition du Festival des arts visuels en Atlantique (FAVA). Sculptures d’oiseaux, installations artistiques interactives, expositions, présentations, créations en direct ou encore ateliers créatifs étaient offerts gratuitement au public! Le FAVA a aussi facilité une résidence de création sur le thème de cette année, Sur le bord du monde, à laquelle ont participé cinq artistes pendant le mois d’août, ainsi que le défi Sketch à travers toutes les provinces de l’Atlantique. Le festival a pour but de créer des liens entre les artistes et le public pour renforcer les liens entre différentes communautés.

Pour en savoir plus et visualiser la galerie du défi Sketch, rendez-vous sur fava.laroutedesarts.com.

Les commentaires sont modérés par l’équipe du Gaboteur et approuvés seulement s’ils respectent les règles en vigueur. Veuillez nous allouer du temps pour vérifier la validité de votre premier commentaire.

Laisser un commentaire

Choisir votre option d'abonnement au Gaboteur

Numérique

(web + tablette + mobile)
Annuler à tout moment

Papier

(accès numérique inclus)
Annuler à tout moment

Infolettre

(des courriels de nous)
Annuler à tout moment