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Souvenirs de Mosey Burns dans la francophonie terre-neuvienne

Le 22 novembre dernier, la ville de Stephenville a dévoilé un monument dédié à une légende locale à Kin Square. Mosey Murrin, également connu par les résidents sous le nom de Mosey Burns, est une personnalité locale de la région. Mort en 1980, l’esprit du Terre-Neuvien persiste encore aujourd’hui dans les chansons et les histoires de la mémoire collective des habitants de la région, en anglais et en français.

Cody Broderick

Le mémorial dédié à Mosey Burns participe d’une initiative plus large de la ville visant à rendre hommage à l’histoire de la municipalité et à ses personnages clés.

Conteur sans domicile fixe, Mosey Burns est né à Spaniard’s Bay au début du 20e siècle. Il a déménagé sur la côte ouest avec ses parents quand il était un jeune homme, mais contrairement à la plupart des nouveaux résidents de la région, qui travaillaient à l’usine de papier de Corner Brook, Mosey préférait vivre une vie de vagabond. Selon lui, «seuls les idiots et les chiens travaillent» («only fools and dogs work!», disait-il en anglais).

Le mendiant célèbre vivait du peu qu’il pouvait obtenir. Il se trouvait souvent sur la route de 83 kilomètres entre Stephenville et Corner Brook, traînant sa brouette et racontant des histoires à tous ceux qu’il croisait (surtout pour une pièce de monnaie ou deux). Ainsi, afin d’illustrer le style de vie du vagabond, le monument commémoratif prend la forme d’une statue de sa fameuse brouette, sur lequel on trouve un portrait de l’homme et un livre ouvert. Dans ce livre, on découvre des histoires à propos de Mosey Burns, en anglais, certes… mais certaines légendes de ce personnage existent également en français.

Des hommages à la franco-terreneuvienne

Connu pour son humour, Mosey racontait des histoires et des blagues aux habitants de la région ouest de l’île qui transcendaient les langues. Gerry Formanger, violoniste renommé de la péninsule de Port-au-Port, qui a collaboré en 1980 à l’album Music From French Newfoundland, a même écrit une chanson sur cet homme sur son album Side By Each (1982). Intitulée «The Ballad of Mosey Burns», le violoniste transforme les blagues du vagabond en toune. En voici le début:

«Come all ye folks and listen

to a story I will tell,

About a man who walks the streets,

the streets of Stephenville;

He wears three shirts, two overcoats,

his beard is mighty long,

It’s Mosey Burns I’m speaking of,

a legend of our town.»

«Venez tout l’monde et écoutez

l’histoire que j’vais vous raconter.

Celle d’un homme qui marche dans les rues,

les rues de Stephenville;

Il porte trois chemises, deux manteaux,

sa barbe est très longue,

C’est de Mosey Burns que j’vous parle,

une légende de notre ville.» [traduction libre]

Une statue commémorative fabriquée pour ressembler à une brouette en rouge. Au milieu de la statue: un livre ouvert, sur le haut, une photo d'un homme.
Le mémorial dédié à la mémoire de Mosey Murrin à Stephenville fait partie d’une série de projets visant à rendre hommage à l’histoire et à la culture de la région. Photo: Courtoisie Rosalyn Roy (The Appalachian)

Si on fait une petite recherche sur Mosey Burns dans les archives du Centre d’études franco-terreneuviennes de l’Université Memorial, on découvre que ses contes ont aussi pris vie dans la langue de Molière. Des résidents de la péninsule Port-au-Port, Cornelius Rouzes, Frank Louvelle et Willy Cornect, ont tous repris des histoires de Mosey et les ont incorporées dans leur propre répertoire de contes et de blagues. «Un jester [un plaisantin] – il est malin, Mosey Burns…», déclare M. Rouzes dans un enregistrement des archives collecté par le folkloriste et spécialiste de la culture franco-terreneuvienne, Gerald Thomas.

Ce dernier donne d’ailleurs une nouvelle vie aux histoires de Mosey dans un entretien avec le violoniste franco-terreneuvien Émile Benoit dans son livre The Two Traditions: The Art of Storytelling Amongst French Newfoundlanders. Un moyen de préserver celles-ci de l’oubli – en français.

Une des histoires de Mosey Burns rapportée par le musicien relate le jour où la police lui a demandé s’il savait qui fabriquait l’alcool de contrebande dans la région. Il imite Mosey Burns dans son vieux accent franco-terreneuvien: «Cinq dollars ej te dira tchi-ç-qui fait le moonshine […].» Le policier lui donne donc cinq dollars. «Tchi-ç-qu c’est?», lui demande le policier. «Le Bon Dieu!», raconte le musicien en rigolant. Il continue: «Si tu me donnes encore cinq pièces je te dirai qui fait le…le… le sunshine!» (p. 356, The Two Traditions: The Art of Storytelling Amongst French Newfoundlanders, Thomas).

Quelle que soit la langue dans laquelle ses blagues et ses histoires étaient racontées, son humour décapant a fait son chemin dans les foyers et les cultures des Franco-Terreneuviens autant que celles des anglophones. Grâce à ce nouveau monument, la contribution de Mosey Burns à la riche tradition orale et musicale de la région, ainsi que le personnage lui-même, resteront, bien vivants, dans les mémoires. 

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