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Un blizzard et une avalanche de talents

Je n’avais jamais mis les pieds à Terre-Neuve-et-Labrador. Mon seul lien avec la province avait été quelques mandats ponctuels pour Le Gaboteur, jusqu’à tout récemment piloté était par Jacinthe Tremblay.  À peine arrivé à St. John’s, un

Je n’avais jamais mis les pieds à Terre-Neuve-et-Labrador. Mon seul lien avec la province avait été quelques mandats ponctuels pour Le Gaboteur, jusqu’à tout récemment piloté était par Jacinthe Tremblay. 

À peine arrivé à St. John’s, une tempête hors du commun s’abat sur une bonne partie de la province. La ville est paralysée, du moins pour une bonne partie de l’avant-midi de lundi.

Je déambule dans les rues désertes. Le vent souffle, on dit que les rafales ont atteint les 105 km/h. J’aime l’hiver. Celui que je découvre ici me séduit.

À mon arrivée, alors que j’explore la ville, je tombe sur une affiche annonçant un concert. Mon cœur s’arrête de battre.

Leonard Cohen.

Pour le Montréalais – et le fan fini que je suis –, ce nom est évocateur. L’affiche annonce un concert regroupant plusieurs artistes dont les noms me sont inconnus. Ça tient l’affiche trois soirs.

Complet. Je n’arrive pas à y croire. Les billets pour les trois soirs se sont envolés. À que cela ne tienne. J’ai très peu de contacts à St. John’s mais je m’active à les rejoindre pour leur faire part de mon désarroi et surtout de mon intention de faire tout en mon pouvoir pour mettre la main sur au moins un billet. En vain. J’ai même tenté de soudoyer une membre du conseil d’administration du Gaboteur qui détient une paire de billets.

Je dois me résigner. Je n’irai pas.

Comme ça a été souvent le cas dans ma vie, l’hiver vient à ma rescousse.

Vu la tempête qui s’abat sur toute la péninsule, le LSPU Hall prend la sage décision de reporter au lendemain (lundi) le concert de dimanche. 

Le musicien virtuose
Sandy Morris pelletant pour assurer la sécurité des spectateurs de Feast of Cohen, le 6 janvier 2020. Photo: Jacinthe Tremblay

Jacinthe, la toute nouvelle retraitée du Gaboteur entre tel un coup de vent dans les bureaux, son iPhone à la main, elle se précipite vers moi : «tu ne le croiras pas», me dit-elle. «Regarde cette photo que j’ai prise, Sandy Morris, lui-même est en train de pelleter devant l’entrée du LSPU Hall, il ma confirmé qu’il reste des billets pour la représentation de ce soir.»

Je me précipite illico à la billetterie et je mets la main sur un billet. Hallelujah.

Un concert que je ne suis pas près d’oublier. Non sans imperfections, mais comme le dit si bien Cohen : «There is a crack in everything. That’s how the light gets in»

Parmi les moments forts, je garde un souvenir impérissable de Amelia Curran, qui après avoir offert une version personnelle et bien sentie de Chelsea Hotel, s’est attaquée à Everybody Knows. Toute en retenue, la chanteuse émeut par la parfaite maîtrise de son art. Amelia, I’m your fan.

À la toute fin du concert, s’amène Matthew Hornell. Occupant la scène comme nul autre. L’audacieux Matthew nous offre Steer Your Way du tout dernier album de Cohen (2017) paru à peine quelques jours avant sa disparition. Sa relecture est prodigieuse. So long Matthew.

Un mot pour le band et les choristes – les célèbres Cohenettes – impeccables. Mention spéciale à la violoniste Maria Cherwick. 

Je suis en pays Terre-Neuvien pour seulement un mois. Si mes premiers jours passés ici sont à l’image de ce court séjour. Je suis le plus heureux des hommes.

Patrice Francoeur

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