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La parole aux parents

Dans l’édition du 31 mai 2021, il y a eu une erreur de publication avec cet article.(article entremêlé avec un autre). Le Gaboteur publie donc l’article dans son entièreté ici: La recommandation faite par le rapport Greene d’abolir les deux distr

Dans l’édition du 31 mai 2021, il y a eu une erreur de publication avec cet article.(article entremêlé avec un autre). Le Gaboteur publie donc l’article dans son entièreté ici:

La recommandation faite par le rapport Greene d’abolir les deux districts scolaires de la province pour faire des économies, et en particulier le Conseil scolaire francophone provincial de Terre-Neuve-et-Labrador (CSFP) ne laisse pas indifférents les parents d’enfants scolarisés dans une des six écoles francophones de la province. Dans ce contexte particulier, l’absence de la directrice générale du CSFP dans la province en inquiète également plus d’un.

Coline Tisserand

«Cela fait des années qu’on se bat pour conserver notre langue. Gilles Vigneault a dit: l’ADN d’une culture, c’est la langue, donc c’est très important de conserver cela», déclare un parent aux racines québécoises. «Dans ces dossiers-là, les francophones se font oublier, ils ne font pas toujours comprendre par la majorité anglophone», poursuit celle dont l’enfant fera toute sa scolarité en école francophone au Labrador.

Bien que l’article 23 de la Charte des droits et libertés garantit aux minorités francophones le droit d’avoir et de gérer leurs propres écoles, la plupart des parents interrogés se disent inquiets face à cette recommandation du rapport Greene. «Le Canada a pris la décision de reconnaître le français comme langue officielle, alors il faut se donner les moyens de la garder, notamment avec l’éducation», souligne Sébastien Donnet, parent de deux enfants scolarisés dans le système francophone de la province. Pour lui, le fait d’avoir deux conseils scolaires distincts est essentiel pour répondre aux besoins différents des communautés francophones et anglophones.

Garder un lien avec la communauté

C’est cette inquiétude qui a notamment poussé à la création, le 8 mai dernier, d’une pétition demandant le retour immédiat de la directrice générale du CSFP, Kim Christianson.  Cette dernière vit en Ontario depuis le début de la pandémie en mars 2020 pour être proche de sa famille. En date du 20 mai, 115 parents d’enfants inscrits dans une des six écoles francophones avaient signé la pétition pour qu’elle revienne dans la province. Selon le site Internet du CSFP, il y actuellement 350 élèves dans ces écoles.

«Il y a beaucoup de personnes qui sont concernées avec cela, j’ai trouvé que c’était une bonne idée de la signer. Au début de la COVID, tout était en ligne, même l’école, donc je comprends l’absence de la directrice générale…Mais en ce moment, peut-être qu’on a besoin d’une présence, surtout avec le rapport Greene et la suggestion d’abolir le CSFP. Le fait qu’elle ne soit pas là donne une mauvaise image devant le reste de la province et la majorité anglophone», pense Daria Gallardi, mère de deux petites filles scolarisées à l’école des Grands-Vents et à la garderie Les p’tits cerfs-volants.

Cette pétition a d’ailleurs été partagée sur la page Facebook de la Fédération des parents francophones de Terre-Neuve et du Labrador (FPFTNL). «À mon avis, le CSFP est l’organisme le plus important dans la communauté francophone: il représente les écoles! Il faut que la directrice générale soit ici, il faut qu’elle vienne démontrer du leadership, il faut qu’elle montre qu’elle a à cœur la communauté francophone, et qu’elle a envie d’y vivre dans cette communauté-là», affirme Martine Fillion, directrice générale de la FPFTNL. Après un an et demi d’absence, elle estime que le lien que Kim Christianson entretient avec la communauté n’est plus le même et qu’«il est cassé».

Mme Fillion estime que cette absence, en plus de l’enquête du contrôleur général en cours concernant les 100 000$ en voyages d’affaires de Mme Christianson, font ombrage à la communauté francophone. «On entend bien protéger le CSFP, mais on ne le fera pas aveuglément. Si on veut défendre le conseil scolaire, il faudra aussi que lui démontre de la transparence. Ce serait un peu dommage de défendre un conseil scolaire et son existence, alors qu’il y a une direction qui ne veut pas vraiment revenir dans la province».

Repenser le CSFP?

Martine Fillion espère qu’un dialogue sera possible entre les parents, le CSFP et le ministère de l’Éducation avant toute décision concernant l’abolition des districts. «Avant d’en arriver là, ce serait bien qu’on se parle, qu’on discute. Ce n’est pas malsain qu’on remette en question un quart de siècle d’une structure, mais qu’on veuille y aller trop rapidement pour faire des économies budgétaires n’est pas la solution.»

Elle rappelle qu’avant les élections du CSFP en 2016, ce sont les personnes élues parmi les membres des conseils d’écoles de chaque région qui faisaient partie du conseil d’administration du CSFP. «La gouvernance est un peu détachée[…], maintenant ce sont des membres élus à part.»

Un parent anglophone, père d’une famille exogame, partage cette idée. «À mon avis, il sera probablement nécessaire de repenser la façon de fonctionner. L’important, c’est d’avoir une clarté de vision, un engagement de la part des parents et d’être réaliste.» Il ajoute : «Comme dit l’expression “never waste a crisis”, cette crise est une opportunité de repenser [le CSFP]».

C’est par voie de communiqué que le CSFP a décidé de répondre à la pétition des parents. «Nous souhaitons assurer les étudiants, les parents, la communauté francophone et la province dans son ensemble que le CSFP a réussi à rester efficace et énergique pendant la pandémie, même si les employés du siège social travaillent à domicile», déclarait ainsi le vice-président Michael Clair dans ce communiqué du 21 mai. Le CSFP a déclaré qu’un autre communiqué serait publié prochainement en réponse au rapport Greene*.

De son côté, le Conseil provincial des parents de la FPFTNL s’est réuni le 22 mai pour discuter de ces enjeux. Martine Fillion a indiqué au Gaboteur que la FPFTNL a prévu d’envoyer une lettre au CSFP en réponse à leur communiqué du 21 mai. La fédération prévoit également de réagir au rapport Greene avec une lettre «envoyée au ministre de l’Éducation concernant l’importance du CSFP pour les parents et la communauté francophone dans sa totalité».

L’importance de rester unis

Face aux évènements actuels, certains parents soulignent l’importance de dépasser les tensions pour se montrer en tant que communauté francophone forte et unie. «C’est important de se resserrer les coudes en tant que communauté, puis de faire en sorte qu’on représente bien la communauté. Parce qu’en tant que minorités, on n’a aucun pouvoir politique, à part l’article 23 de la Constitution», affirme Martin Henri, Acadien et père de deux enfants scolarisés à l’école des Grands-Vents et à la garderie Les p’tits cerfs-volants.

Pour lui, le CSFP ne doit pas perdre de vue sa mission qui est de représenter la communauté francophone, et en particulier les parents des enfants francophones, et ce, pour le bien-être des enfants. «Ce n’est pas la communauté francophone qui doit nécessairement essayer de protéger un peu certaines personnes à l’intérieur de l’organisme. La raison d’être du conseil scolaire, c’est plus important qu’une ou deux personnes qui sont là», dit-il.

Il souligne que c’est le futur des écoles francophones qui est en jeu. «Il y a de grosses décisions qui s’en viennent et il faut s’assurer qu’on a les meilleures chances possibles pour prendre ces décisions.»

Des défis pour l’éducation en français

Martin Henri évoque notamment le «gros dossier» de la nouvelle école prévue à Galway, ou encore le besoin d’un terrain de jeu à l’École des Grands Vents. De son côté, Martine Fillion souligne également l’importance de s’occuper des bâtiments des six écoles déjà existantes. La question de la rétention lors du passage en école intermédiaire est également un défi prioritaire soulevé par plusieurs parents interrogés.

«On [la communauté francophone] est rendu à un point critique dans notre histoire, il est temps de montrer notre plus beau côté, notre plus visage et faire preuve de solidarité entre nous autres, en tant que communauté», conclut le parent Martin Henri.

*Le 26 mai, lors de la mise sous presse du journal le matin, ce communiqué de presse du CSFP n’avait pas encore été rendu public.

Précision:

Deux des parents interrogés par Le Gaboteur ont souhaité rester anonymes. Nous avons respecté leur vœu afin de leur permettre de témoigner ouvertement sur ce dossier actuel sensible.

 

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