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Distinctions: Selma Barkham

Hier, Terre-Neuve-et-Labrador a perdu une personne très importante. Selma Barkham, historienne spécialisée dans l’histoire basque en Amérique du Nord, a découvert la station baleinière basque à Red Bay, Labrador. Grâce à son travail, la station a été déclarée un site du patrimoine mondial par l’UNESCO. En sa mémoire, Le Gaboteur a tiré quelques articles dans lesquelles vous pouvez découvrir ses contributions à la province.

Selma Barkham reçoit l’Ordre de Terre-Neuve-et-Labrador

Selma Barkham, l’historienne qui a découvert la Station baleinière basque de Red Bay en 1977, s’est vu décerner l’Ordre de Terre-Neuve-et-Labrador le 30 septembre 2015.

Holly Simon, Cap-Saint-Georges

L’Ordre de Terre-Neuve-et-Labrador a été décerné le 30 septembre 2015 à Selma Barkham.

Dr. Selma Barkham est l’historienne et géographe qui a découvert la Station baleinière basque de Red Bay, au Labrador. Cette découverte date de 1977 et, encore aujourd’hui, des recherches archéologiques sont réalisées dans la région. Le site fait partie du patrimoine mondial de l’UNESCO en tant que premier complexe industriel d’Amérique du Nord.

Ses années de recherche dans les années 1970, principalement dans des archives basques, espagnoles et portugaises ont mis en lumière ce qui était un chapitre pratiquement inconnu de l’histoire de Terre-Neuve-et-Labrador : la pêche à la morue et chasse à la baleine par les Basques dans la province au 16ème siècle.

Sans les recherches pionnières de Selma Barkham, la Station baleinière basque du 16e siècle de Red Bay n’aurait jamais été déclarée site historique national du Canada en 1979, puis site du patrimoine mondial de l’UNESCO en 2013, attirant ainsi l’attention du monde sur Terre-Neuve-et-Labrador.

Selma Barkham à Saint-Jean

C’est au mois d’août que les autorités de la province ont appelé Selma Barkham pour lui offrir l’Ordre de Terre-Neuve-et Labrador. Elle a accepté avec plaisir. « Je suis fière de recevoir cette reconnaissance, et heureuse d’avoir ainsi eu l’occasion de revenir à Terre-Neuve et de revoir mes amis. J’espère aussi que mes recherches contribuent à inspirer et à éveiller l’intérêt pour l’histoire chez les habitants de la province », a-t-elle déclaré au Gaboteur. « Ma mère est une femme modeste », a commenté son fils, Michael Barkham, historien et professeur à l’Université de Cambridge (Royaume-Uni).

Cette passionnée de la région est aussi ravie de revoir Terre-Neuve-et-Labrador. « Je n’ai pas l’impression que ça fait si longtemps. Ici, c’est le paradis. C’est magnifique d’être de retour; regarder la mer me rend très heureuse. »

La côte basque de Terre-Neuve

En plus de ses découvertes à Red Bay, Selma Barkham a aussi fait des recherches sur la Côte Ouest de Terre-Neuve (French Shore). Les résultats de ses recherches ont été publiés dans le livre « The Basque Coast of Newfoundland ». Vers 1988, elle a fait des recherches sur la péninsule de Port-au-Port, sur la géographie et l’histoire basque de la région.

Le Gaboteur et moi-même tenons à exprimer nos félicitations au Docteur Selma Barkham non seulement pour ses contributions en ce qui concerne la présence basque à Terre-Neuve-et-Labrador et dans tout le Canada atlantique, mais aussi pour avoir aidé la communauté francophone de Terre-Neuve à découvrir une partie de son héritage, qui était presque perdu jusqu’à ses découvertes.

L’histoire d’une grande découverte

Dans les années 1960 et 1970, Selma Barkham, veuve avec quatre enfants, a entrepris ses recherches sur l’histoire basque de Terre-Neuve-et-Labrador toute seule. Les institutions ont d’abord refusé de la financer.

Holly Simon, Cap-Saint-Georges

Le lieu historique national de Red Bay au Labrador a été déclaré Site de l’Héritage mondial par l’UNESCO en 2013. Selma Barkham n’avait jamais imaginé que ses recherches aboutiraient à un tel résultat. Pour son fils Michael, « cela montre l’effet révolutionnaire du travail de ma mère pour le monde ».

Pour Selma Huxley, qui est née en Angleterre en 1927, tout commence au début des années 1950. À cette époque, elle décide de passer quelque temps à visiter des parents au Canada. Elle s’installe à Montréal et travaille comme bibliothécaire à l’Institut arctique d’Amérique du Nord, à l’Université McGill.

En 1953, elle rencontre son futur mari, un jeune architecte anglais, Brian Barkham, qui est profondément en amour avec le Pays basque. En été 1950, Brian avait quitté l’Angleterre sur sa moto avec un autre étudiant de l’Université de Londres pour étudier l’architecture rurale de l’Andalousie, dans le sud de l’Espagne. Mais, en raison de diverses circonstances, il avait fini dans le Pays basque à étudier des caseríos (fermes), ce qui deviendrait le sujet de sa thèse de maîtrise.

Rencontre avec Don Pío de Montoya

Selma n’imaginait pas combien cette rencontre allait changer sa vie. En 1954, le couple nouvellement marié déménage à Ottawa. Deux ans plus tard, ils visitent le Pays basque où un ami, le prêtre Don Pío de Montoya, leur parle de l’ancienne présence basque au Canada.

« En 1956, alors qu’ils étaient assis au port avec le prêtre Don Pío de Montoya et qu’ils observaient des bateaux revenant de Saint-Pierre-et-Miquelon, le prêtre leur a expliqué qu’il y avait un lien de longue date entre les Basques et le Canada, et que quelqu’un devrait venir ici et faire de la recherche. Sur le moment, mes parents n'y ont pas beaucoup pensé », explique Michael Barkham.

En 1964, à l’âge de 37 ans, Selma Barkham devient veuve, avec quatre enfants de moins de dix ans à charge. Elle travaille comme historienne pour les lieux historiques nationaux sur divers projets, dont la restauration de Louisbourg, forteresse française du 18ème siècle et port de pêche commercial, sur l’île du Cap-Breton.

Ce faisant, l’intérêt pour les voyages de pêche européens dans cette région pendant les siècles précédents la gagne, en particulier ceux reliés au Pays basque. Elle élabore un plan de recherche et s’informe, dans les archives de l’Espagne et de la France, sur la pêche basque au Canada aux 16 e et 17 e siècles. Elle parle déjà anglais et français, mais sait qu’elle doit apprendre l’espagnol.

Départ pour le Mexique

A cette époque, dans les années 1960, il était déjà reconnu que les Basques avaient pêché la morue et effectué des expéditions de chasse à la baleine à Terra Nova durant les 16 e et 17 e siècles, mais on possédait très peu d’informations documentaires sur le sujet.

En 1969, Selma Barkham décide de déménager au Mexique. Elle y travaille comme professeure d’anglais pour faire vivre sa famille. Trois ans plus tard, en 1972, elle fait une demande au Conseil des Arts pour commencer ses recherches. Suite à cela, elle met sa famille et ses effets à bord d’un cargo à destination du port basque de Bilbao.

Cependant, elle ne commence pas ses recherches, comme espéré, en étant soutenue et financée par une institution, mais à son propre compte, avec peu de moyens par rapport aux besoins. Peu de temps après son arrivée à Bilbao, elle apprend que sa demande de subvention est refusée. « Ils pensaient que ce travail avait déjà été fait. Elle n’avait pas d’argent et a vécu des débuts difficiles », explique Michael.

Selma Barkham se retrouve sans emploi, avec peu d’argent et sans perspectives claires. Elle pense que les archives peuvent contenir des informations précieuses. Au cours de la première année, elle enseigne l’anglais, et étudie la paléographie espagnole à l’Université de Deusto pendant la soirée. Elle reçoit quelques dollars d’un donateur anonyme canadien, qui lui permettent de payer le loyer, et elle commence à faire ses premières découvertes d’importance dans les archives.

Un contrat avec les Archives publiques

En 1973, elle réussit à négocier un contrat avec les Archives publiques du Canada pour trouver des documents d’importance pour le Canada en Espagne. Mais le contrat, qui est renouvelable, est à temps partiel et ne comprend pas de budget pour un téléphone ou une voiture. Le reste du temps, elle poursuit ses propres recherches. Cette même année, elle déménage dans la ville basque d’Oñati, où elle a continue ses recherches, qui la mènent à découvrir Red Bay en 1977.

Selma Barkham travaille en ce moment sur son autobiographie : elle en a achevé un premier jet. « Il ne reste plus que quelques détails à finaliser. Je vais devoir la pousser pour qu’elle termine. Et je la regarde droit dans les yeux en disant cela, ajoute Michael Barkham avec un petit rire. Je pense que c’est une histoire qui mérite d’être racontée. »

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