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Quand Juda sortit du ventre de la baleine

En attendant la parution en français de Sweetland, prévue pour le 8 août aux éditions Léméac, les vacances d’été sont l’occasion de se plonger ou se replonger dans l’un des autres grands livres Michael Crummey paru en français. Du ventre de

En attendant la parution en français de Sweetland, prévue pour le 8 août aux éditions Léméac, les vacances d’été sont l’occasion de se plonger ou se replonger dans l’un des autres grands livres Michael Crummey paru en français. Du ventre de la baleine conte l’histoire foisonnante d’une communauté isolée de Terre-Neuve et des individus qui la forment.

Aude Pidoux

Alors que Mary Tryphena est encore enfant, une baleine s’échoue sur la rive de son petit village de Terre-Neuve. Les habitants s’affairent à la dépecer quand ils découvrent dans son ventre un bras, puis une tête, jusqu’à ce qu’un coup de couteau finisse par libérer un homme livide. Tous le prennent d’abord pour un cadavre. Mais l’homme, muet et à la blancheur mystérieuse, est bien vivant et finit par trouver sa place dans la vie du village et dans la famille de Mary Tryphena.

Du ventre de la baleine, la traduction française de Galore, célèbre roman de l’auteur terre-neuvien Michael Crummey, est un livre pour voyager, cet été, sans bouger de sa chaise-longue. Dans un style friand d’anecdotes, l’auteur y peint la vie d’une communauté isolée de Terre-Neuve entre le 19e siècle et le début du 20e siècle, en y mêlant croyances, fantômes et grande histoire. Juda, sorti du ventre de la baleine, et Mary Tryphena sont les fils conducteurs de ce roman qui débute dans l’isolement d’un village de pêcheurs accessible par la mer seulement. Il y règne une atmosphère confinée, créée par la dureté de la vie, le froid du dehors et les amours parfois contrariées des hommes et des femmes. 

L’arrivée du monde extérieur

Au fur et à mesure qu’avance l’histoire et que le monde extérieur s’introduit dans la vie de la communauté, les oppositions qui forment le noyau du roman évoluent, mais ne s’altèrent pas. L’arrivée d’un prêtre catholique et d’un pasteur protestant accentue les différences entre descendants d’Irlandais et d’Anglais, la syndicalisation de certains et la mise en place d’un système politique plus représentatif encouragent les rivalités. Et surtout, l’animosité qui empreint les relations entre la famille de Mary Tryphena et celle du notable du village, Dame-Moi Sellers, se répercute de génération en génération, malgré les liens cachés que créent les membres des deux clans, ou à cause d’eux.

Grande saga familiale, Du ventre de la baleine inscrit la grande histoire dans le quotidien simple d’une petite communauté. Mais surtout, le roman explore les relations qui construisent ses habitants et qui rendent leur vie riche malgré son âpreté. Touffue, foisonnante, surnaturelle, passant d’un personnage à l’autre, l’histoire explore les sentiments contradictoires qui unissent les habitants d’un même lieu. Le mystère de l’arrivée de Juda et de son histoire, qui finit par se répéter, grave l’extraordinaire dans un quotidien qui ne l’est pas moins et qui forme l’histoire des petits villages de pêcheurs de Terre-Neuve. Michael Crummey, en réunissant en un roman de nombreuses recherches et anecdotes trouvées dans les archives, a signé avec Du ventre de la baleine un roman d’envergure, qui décrit avec brio un grand pan du passé de Terre-Neuve, en le rendant à ses habitants qui, individuellement et collectivement, ont formé son histoire.  Seul bémol : les dialogues, qui à forcent de vouloir faire « vrais » peuvent parfois paraître artificiels.

Michael Crummey, Du ventre de la baleine, Éditions du Boréal, 2012.

Encore un prix pour Michael Crummey

Le dernier roman de l’auteur terre-neuvien Michael Crummey, Sweetland (à paraître en français au mois d’août), a remporté le prix principal des NL Book Awards le 6 juin. Le livre conte l’histoire d’un Terre-Neuvien qui refuse de quitter son village alors que toute sa communauté est relocalisée ailleurs.

Dans son allocution, Michael Crummey a fait savoir qu’il verserait l’entier de son prix, soit 1500 $, à la bibliothèque de Buchans, sa ville natale, l’une des nombreuses bibliothèques de la province affectées par les coupes budgétaires de cette année.  « J’aimerais dire combien la bibliothèque de Buchans a été importante pour moi, et l’influence que cet endroit a eu sur ma vie. Je ne pense pas que je serais sur ce podium aujourd’hui si cet endroit n’avait pas existé », a-t-il déclaré lors de la réception de son prix.

Michael Crummey avait déjà remporté le NL Book Award dans la catégorie poésie en 1996. Aussi bien Sweetland que Du ventre de la baleine ont été nominés pour le Prix du gouverneur général. En novembre 2015, Michael Crummey a reçu 50 000 $ de bourse du Writers’ Trust of Canada. Un autre de ses romans traduit en français, Les voleurs de rivière, avait été récompensé du Prix Thomas Head Raddall et du Prix des libraires indépendants de l’Atlantique. (AP)

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