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Écouter et prendre au sérieux les personnes victimes de harcèlement

Ce n’est pas un secret que le centre-ville de St. John’s peut être dangereux, mais les problèmes sont plus nuancés qu’on pourrait le croire.

Nous sommes parfois rapides à mettre la responsabilité des taux de criminalité sur les gens qui luttent avec la pauvreté et la toxicomanie. Je crois qu’en réalité, beaucoup de situations dangereuses pourraient être évitées ou arrêtées entièrement si les personnes en position d’autorité s’en souciaient vraiment. Ma croyance sur le sujet a été renforcée par quelque chose qui m’est arrivé récemment.

Kirsten Amoureuse

Le 2 octobre, alors que je travaillais, un homme est entré dans notre bâtiment. Cet homme est connu dans l’immeuble où je travaille comme étant agressif, donc on m’a dit d’appeler un garde de sécurité si je le voyais s’approcher de moi.

Avant que je puisse réagir, il a commencé à me crier au visage. Au début, je n’étais que légèrement intimidé.e, probablement à cause de l’adrénaline. J’ai donc appelé la sécurité, et l’homme est finalement sorti.

Les choses sont devenues beaucoup plus bouleversantes lorsque j’ai découvert qu’il était armé, et qu’il avait caché un couteau dans les toilettes publiques dans l’espoir de blesser quelqu’un. Après avoir appelé la sécurité une deuxième fois, le gardien a appelé la police. Finalement, ni le garde ni le policier n’ont semblé s’en soucier: ils n’ont rien fait pour empêcher l’homme de revenir, et n’ont pris aucune mesure pour s’assurer que moi et mes collègues puissions nous sentir en sécurité à l’avenir.

J’espérais que ce serait la dernière fois que j’allais voir cet homme ou un policier ce jour-là, mais non, l’homme était de retour. Cette fois, il poursuivait les gens sur Water Street avec un autre couteau. J’ai décidé d’appeler la police moi-même cette fois, car j’avais l’impression que la sécurité de l’immeuble ne me prenait pas au sérieux. Je n’aurais jamais pensé que la police ferait pareil. En effet, les agents de la police n’ont pris aucune mesure appropriée contre cet homme, et n’ont montré aucune empathie envers moi et mes collègues, qui ont dû faire face à son harcèlement. Personne ne l’a empêché de revenir ce jour-là, et quand je suis sortie après le travail, j’ai découvert que cet homme était à l’extérieur du bâtiment.

J’étais terrifié.e. J’ai donc appelé le service de sécurité du bâtiment pour la troisième fois de la journée. Tout ce que je demandais, c’était d’être accompagné.e pour quelques minutes pour marcher, car je pensais que l’homme allait me poursuivre jusqu’à la maison. L’agent de sécurité a semblé ennuyé par ma demande et m’a demandé  pourquoi je m’inquiétais de cela, comme si c’était bizarre d’avoir peur d’un homme dangereux. Le garde a fini par simplement rester sur les marches de l’immeuble, et a regardé de loin pendant que cet homme me criait dessus alors que je descendais Water Street.

Je suis rentré.e chez moi physiquement sain.e et sauf.ve, mais la quantité d’anxiété et de stress que j’ai ressenti au travail ce jour-là était complètement malsaine. Impossible de ne pas me sentir angoissé.e, rien qu’à l’idée de le revoir pendant mon travail. 

Je l’ai bien sûr revu plusieurs fois, et à chaque fois que j’appelais la sécurité, mes collègues me disaient que ce n’était pas nécessaire. Ils me donnaient l’impression que je dramatisais la situation sans raison.

Cette histoire a atteint son point culminant une semaine plus tard, le 9 octobre, quand l’homme est revenu à mon lieu de travail. Il m’a poursuivie en hurlant jusqu’à ma voiture alors que je finissais le travail pour la journée. Je ne me suis jamais senti.e aussi terrifié.e et impuissant.e de toute ma vie d’adulte.

Mes collègues, mon patron, le service de sécurité de l’immeuble et la police ont ignoré mes peurs en disant que c’est «quelque chose qui arrive» ou «quelque chose auquel je vais m’habituer», mais tout cela me semble tellement injuste. La majeure partie de mon anxiété envers cette situation vient du fait que je crois qu’il faudra que je sois sérieusement blessée par cet homme pour que quelqu’un commence à me prendre au sérieux.

Je partage mon expérience ici, car je pense que je ne suis pas la seule personne à subir ce genre de harcèlement. Le but de cette lettre est de vous inciter à agir lorsque vous voyez quelqu’un – notamment une femme – dans une situation comme celle que j’ai vécue. Je vous demande de ne pas faire comme les personnes que j’ai rencontrées: le garde de sécurité et les policiers. Faites l’opposé, écoutez les gens qui sont harcelés, prenez-les au sérieux, et aidez-les si vous le pouvez.  

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